L’OAG et son rapport d’observation de la Gouvernance au 1er semestre 2010

mardi 24 août 2010,par Jean Bosco Nzosaba

Résumé exécutif Les préparatifs et l’organisation d’une série d’élections émaillées de contestations de fraudes ont, plus que tout, fortement marqué le premier semestre 2010. Le calendrier annonçait la tenue d’élections communales (24 mai 2010), d’élections présidentielles (28 juin 2010), qui allaient être prolongées, au second semestre, par 3 autres élections (les élections législatives, les élections sénatoriales et élections collinaires). Il est ensuite apparu une bipolarisation du débat politique, caractérisée par la formation de camps irréconciliables : un camp des vainqueurs des élections communales autour du parti CNDD-FDD et de celui des déçus de ce processus électoral, regroupés dans la coalition de « l’Alliance des Démocrates pour le Changement  », ADC IKIBIRI en sigle, dénonçant « les falsifications  » et l’attitude de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI). Dans la situation de dialogue de sourds qui tendait à s’installer et où les camps antagonistes avaient investi toutes leurs forces dans la bataille, il a fallu la prise de position de la communauté internationale. Cette dernière estimait alors qu’il fallait préserver les acquis de la consolidation de la paix et considérait les récriminations des perdants comme un moindre mal, au risque d’aboutir à des élections très controversées et à une régression de la démocratie. Durant cette période, le Parlement en fin de mandat et qui était parvenue à faire taire toute voix discordante, a poursuivi l’adoption de projets de lois dans une grande sérénité, au moment où l’Exécutif affichait, de temps à autres, des signes d’absence de cohésion, surtout à l’évocation de certains dossiers, comme celui en rapport avec la mauvaise gestion de la Société Sucrière du Moso, « SOSUMO en sigle  ». Le contexte général est aussi resté celui où les violences ont constamment fait parler d’elles. Des atteintes à l’intégrité physique des personnes et des biens ont régulièrement été enregistrées, particulièrement au cours de la période électorale avec des assassinats de membres de partis politiques. Des tentatives de déstabilisation des institutions ont également été rapportées, tantôt sous forme de coup d’Etat, tantôt sous forme de malaise sociale, si bien que l’authenticité des actes dénoncés est restée un point d’interrogation. Pour sa part, la société civile a essayé d’être le rempart contre les dérapages de tous genres, des malversations économiques aux violations des droits de l’homme, en passant par la mobilisation pour l’édification d’une société juste et démocratique. Toutefois, l’animation des espaces publiques d’échanges par les médias a failli pâtir du positionnement du Conseil National de la Communication derrière les intérêts du pouvoir politique, au mépris de son rôle de régulateur. Le premier semestre 2010 a également été une période de ralentissement remarquable du fonctionnement des institutions publiques, du fait de l’engagement corps et âme de presque tout le corps administratif dans la campagne électorale. Etant donné les espoirs placés dans la victoire finale, ce moment a été spécial ; ce qui a fait que l’éthique dans l’administration soit fortement entamée. En conséquence, la tendance dans le traitement de plusieurs dossiers a été politisée et la manifestation de la fidélité au parti au pouvoir (le CNDD FDD) clairement affichée. Force est de signaler que le budget 2010 montre une part importante des dons en capital de 53% laquelle confirme la dépendance du pays vis-à-vis des dons extérieurs. Le secteur agricole n’a bénéficié que de 2,7% du budget total des dépenses alors qu’elle occupe plus de 90% de la population. Toutefois, il est bon de noter les promesses d’appuis multiformes des partenaires du Burundi et les initiatives engagées pour améliorer la gestion des ressources publiques dont notamment, le lancement de l’Office Burundais des Recettes (OBR), la réforme du charroi de l’Etat, même si le phénomène de la corruption et celui des malversations économiques font encore parler d’eux. Pour renforcer son économie, le Burundi devra saisir les opportunités offertes par l’intégration dans l’East African Community, éviter la disparition des entreprises publiques par la rigueur dans le suivi de leur gestion, repenser la politique énergétique, construire et réhabiliter les infrastructures routières et portuaires. Enfin, durant le premier semestre 2010, le comité de pilotage tripartite a déposé son rapport définitif sur les consultations nationales organisées de juillet 2009 à décembre 2009. En outre, durant cette période, le secteur de l’éducation a connu une grève qui a duré plus de deux mois tandis que les leaders syndicaux se sont retrouvés assimilés à des saboteurs par l’autorité publique. Toutefois, le pays a enregistré une bonne initiative en matière de santé (le financement basé sur les performances) et l’aboutissement du dossier de naturalisation d‘environ 162.000 réfugiés burundais en Tanzanie. De manière générale, la situation du premier semestre a montré que le Burundi est à la croisée des chemins en matière de démocratie. Face à tout cela, il est recommandé ce qui suit : Au Parlement
  Assurer le contrôle effectif de l’action gouvernementale Au Gouvernement

  Mettre en place des mécanismes de suivi et de mobilisation des financements promis par les partenaires du développement ;
  Assurer la sécurité pour tous sans discrimination
  Promouvoir le dialogue dans la résolution des conflits sociaux
  Lutter énergiquement contre l’impunité du crime y compris les crimes économiques
  Libérer les prisonniers d’opinion
  S’abstenir de s’ingérer dans le fonctionnement interne des partis politiques

A la Commission Electorale Nationale Indépendante
  Publier les PV du dépouillement des différents scrutins

Au Conseil National de la Communication
  Jouer pleinement son rôle de régulateur des médias en toute impartialité

Aux partenaires du Burundi
  Encourager les acteurs politiques à consolider les valeurs démocratiques et prévenir une nouvelle détérioration de la situation
  Soutenir les projets de développement du pays
  Accompagner le Burundi dans la consolidation de la paix et de la réconciliation nationale

Aux leaders politiques
  Eviter la cristallisation, la surenchère et l’intolérance politique.

Aux organisations de la Société Civile
  Renforcer leurs capacités opérationnelles
  Mener un plaidoyer pour la promotion des valeurs de paix, de cohabitation pacifique, de tolérance, de respect de la vie et de démocratie
  Etre proactives

Chronologie de quelques principaux événements de janvier à juin 2010

Date Evénement

18 février 2010 Nomination d’un nouveau Ministre chargé des Droits de l’Homme et du Genre, Madame Christine NDAYISHIMIYE

5 avril 2010 Publication des résultats définitifs du troisième recensement général de la population et de l’habitat 2008

7 avril 2010 Convocation des électeurs pour les élections des conseillers communaux, du du Président de la République, des Députés et des Sénateurs

6 -11 avril 2010 Le Président Pierre NKURUNZIZA effectue une visite au Burkina Faso, Gambie, Sénégal et Bénin.

13-15 avril 2010 Périple du Président NKURUNZIZA en RDC

14 avril 2010 Visite au Burundi du Commissaire à la Paix de l’Union Africaine

18 avril 2010 Monsieur Charles Petrie, Nouveau représentant du SG/NU prend ses fonctions au Burundi

22 avril 2010 Fin de mandat du comité de pilotage tripartite et dépôt du rapport sur les es consultations nationales

23 avril 2010 Pierre NKURUNZIZA désigné candidat du parti CNDD/FDD aux présidentielles

26 avril 2010 Le Président de la République se rend en Angola, en Namibie et en Afrique du Sud.

27 avril 2010 Le Gouvernement suspend le droit de grève pendant les élections

16 mai 2010 Le Gouvernement burundais rejette le rapport de Human Rights Watch La représentante de Human Rights Watch au Burundi est renvoyée

21 mai 2010 Report de l’élection des conseillers communaux

24 mai 2010 Tenue des élections communales

5 juin 2010 Le parti UPRONA se retire des présidentielles

7 juin 2010 Libération de 1300 prisonniers suite à la grâce présidentielle qui avait été annoncée en au mois de mars 2010

8 juin 2010 Le Secrétaire Général des Nations Unies, Ban Ki-Moon en visite au Burundi

11 juin 2010 Ouverture de la campagne électorale pour l’élection présidentielle

22 juin 2010 Prolongation de la date du dépôt des candidatures aux législatives, report du 23 juin 2010 au 27 juin 2010

23 juin 2010 Fuite d’Agathon RWASA, Président du FNL

24 juin 2010 Une délégation des Ministres des Affaires Etrangères des 5 pays de l’EAC arrive au Burundi

28 juin 2010 Elections présidentielles, Pierre NKURUNZIZA, seul candidat

30 juin 2010 La CENI rend publics les résultats provisoires des élections présidentielles

 

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