RAPPORT SUR LA GOUVERNANCE.

RAPPORT D’OBSERVATION SUR LA GOUVERNANCE EN 2008

mercredi 20 mai 2009,par Jean Bosco Nzosaba

L’Observatoire de l’Action Gouvernementale élabore ce troisième rapport d’observation de la gouvernance au moment où le Burundi vient de passer sa troisième année sous la gouvernance des institutions issues des élections. Il s’agit d’un pas en avant assez important sur la voie de la démocratie ; les Burundais et ses partenaires peuvent s’en féliciter. Evidemment, la mise en place des institutions démocratiques est une chose et le fonctionnement démocratique de ces mêmes institutions est une autre.

L’Observatoire de l’Action Gouvernementale, comme cela rentre déjà dans ses habitudes, se propose d’établir un rapport sur la gouvernance au Burundi en 2008, en vue de participer à l’amélioration de cette gouvernance dans les différents secteurs de la vie nationale.

1. La gouvernance politique

Pendant l’année 2008, et par rapport à l’année précédente, les Burundais avaient espéré que les institutions de la République allaient enfin se stabiliser, dans la mesure où un Gouvernement consensuel venait d’être mis en place. Les crises que l’Assemblée Nationale a connues, n’ont pas permis, malheureusement à toutes les institutions républicaines de bien travailler, étant entendu que l’Assemblée Nationale est l’institution motrice des autres.

Au début de l’année 2008 et à d’autres occasions, des promesses ont été explicitement formulées. Certaines ont été tenues mais d’autres n’ont pas pu l’être. Le dialogue entre les partenaires, qui doit être institutionnalisé dans la gouvernance burundaise, a du mal à s’imposer comme mode de résolution des différends. Les échéances électorales de 2010 semblent avoir influencé certains faits et décisions au cours de l’année 2008, et cela n’a pas toujours favorisé un bon climat politique.

2. La sécurité

L’année 2008 a franchi un pas de géant sur la voie de la paix : c’est le retour au pays des responsable du mouvement PALIPEHUTU-FNL. Ce pas a nourri beaucoup d’espoir dans la majorité de citoyens. Evidemment, ce pas n’a pas permis une amélioration assez significative dans ce domaine. Les citoyens ont continué à être inquiétés quotidiennement, même les élus n’ont pas été épargnés. Les armes ont continué à circuler et à être utilisées pour tuer, voler, violer et torturer. La criminalité est allée grandissante, les droits de l’homme ont continuellement été violés. Ces violences sont principalement imputables au retard de l’application des accords signés entre le PALIPEHUTU-FNL et le Gouvernement. Elles sont aussi imputables aux dérapages de certains éléments des forces de défense de sécurité qui ratent le virage de leur métier par manque de professionnalisme. Elles sont dues également à l’usage de plusieurs armes qui circulent au sein de la population, le programme de désarmement n’ayant pas encore permis d’aboutir à des résultats palpables.

3. La gouvernance judiciaire

L’année 2008 a connu une révolution dans la gouvernance judiciaire grâce à l’adoption du nouveau code pénal qui contient des dispositions révolutionnaires en matière de respect des droits humains en générale et des catégories vulnérables en particulier. Il consacre notamment l’abolition de la peine de mort.

Cependant, l’analyse de la situation révèle des tendances à l’instrumentalisation de certaines structures judiciaires. Elle révèle aussi que le principe de la séparation des pouvoirs n’est pas encore respecté, une indépendance de la magistrature qui est loin d’être acquise et des mécanismes de justice transitionnelle qui ont du mal à se mettre en place. L’on peut noter aussi une persistance de l’impunité et une justice populaire conséquente qui tend à s’installer.

4. Les droits et libertés

L’année 2008 a vu naître de nouveaux médias et cela devrait constituer plutôt une bonne nouvelle dans la mesure où ils apportent, en principe, des chances d’élargir les espaces d’expression et d’information. Mais cette année a vu aussi la violation de certaines libertés, allant jusqu’à la censure de la publication scientifique.

Des citoyens, surtout de l’opposition ont été empêchés de se réunir dans leurs partis politiques au moment où d’autres ont été empêchés de se constituer en partis politiques. Des syndicalistes ont été punis jusqu’à la révocation, pour avoir exercé leur droit syndical. Les membres de la société civile ont été menacés pour leur activisme. On rencontre dans les prisons du Burundi, des personnalités politiques, des membres de la sphère médiatique et syndicale.

5. La gouvernance économique

Le Burundi s’attend à l’atteinte du point d’achèvement en janvier 2009, et le Gouvernement devrait travailler dans ce sens. Mais son budget reste largement dépendant de l’extérieur à plus de la moitié et se révèle être un budget de consommation plutôt que d’investissement. Ce qui n’est pas de nature à réduire la pauvreté qui s’est enracinée depuis plus d’une décennie de crise.

Des initiatives devraient être prises pour augmenter les ressources intérieures notamment par le recouvrement des dettes et les reprises sur malversations. Cela avait été par ailleurs promis par les hautes autorités de l’Etat. Le pays reste toujours menacé de payer une lourde tribu à cause des dossiers qui l’opposent aux individus et/ou aux sociétés privées.

L’année 2008 a connu aussi une montée vertigineuse des prix des produits pétroliers sur le marché mondial. Cela a occasionné, à plusieurs reprises, une révision à la hausse des prix du carburant au niveau local avec un impact sur les prix des produits de première nécessité. Heureusement, cette année se clôture avec une bonne nouvelle pour les consommateurs : la révision à la baisse des prix des mêmes produits tant au niveau mondial qu’au niveau local.

6. La gouvernance sociale

La situation sociale du Burundi en 2008 est restée caractérisée par un taux de chômage très élevé même si les statistiques manquent à ce sujet. La fermeture de certaines sociétés publiques ainsi que l’échec de réinsertion des combattants démobilisés gonfle davantage les rangs des chômeurs. Les salaires des fonctionnaires restent maigres et répartis de manière non équitable. Ce qui a alimenté plusieurs grèves durant cette année, des fonctionnaires réclamant des statuts spéciaux pour avoir un léger mieux sur leurs salaires. L’on peut noter quand même la mise en application de la promesse de l’augmentation salariale de 34% qui avait été formulée en l’an 2007 pour les fonctionnaires régis par le Statut Général des fonctionnaires de l’Etat.

Les mesures de gratuité prises dans le domaine de la santé et de l’éducation en l’an 2006 par le Gouvernement ont continué à être appliquées, mais les statistiques indiquent que des besoins criants tant en personnel qu’en matériel scolaire se font sentir de façon pressante. Dans les hôpitaux, des effets contre-productifs sont à craindre à cause des retards dans le remboursement des factures occasionnées par les mesures de gratuité des soins de santé. Le rapatriement des réfugiés, tant volontaire que forcé a continué tandis que l’appui du HCR reste limité et leur réinstallation pose toujours des problèmes sociaux assez importants. Il posera encore d’autres problèmes, fonciers essentiellement, si il ne va pas de pair avec la réinsertion des déplacés.

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